Mot à mot

Vendredi 9 novembre 2012 : déjeuner avec Sylvie à l’occasion de la sortie de son abécédaire aux éditions du Cherche Midi.

Je suis très heureux de vous retrouver car nous n’avions pas pu faire d’interview depuis fort longtemps. La dernière occasion ratée avait été votre pièce de théâtre…

Oui je répétais la journée et faisais les représentations le soir et ça n’était vraiment pas évident de trouver le temps de se croiser.

Quels souvenirs gardez-vous de cette première expérience au théâtre ?

J’ai beaucoup aimé jouer « L’amour, la mort, les fringues » car le texte était très drôle et cela a été l’occasion de travailler avec Danielle Thompson dont j’apprécie beaucoup le travail. Elle a réussi à faire une traduction plus drôle que le texte original. Pour moi qui suis habituée à la scène, la difficulté a surtout été de gérer l’écran puisqu’il s’agissait d’une lecture sur un I-pad. En plus, un écran tactile peut parfois être très capricieux ; cela sautait, je risquais de perdre le fil, ce qui ajoutait au trac. J’avais beaucoup de mal à m’en affranchir même si je connaissais finalement très bien le texte mais je restais tributaire de l’I-Pad car c’était le principe même de l’exercice.

Vous aimeriez renouveler l’expérience ?

Bien sûr. J’adorerais rejouer au théâtre, peut-être avec une mise en scène moins statique, des changements de décors, etc. mais il faudrait que l’occasion se présente.

Il y a eu un grand émoi sur vos forums lorsqu’il a été annoncé que vous alliez faire une tournée d’adieux en 2013.

Oui ce n’était pas ma volonté car je n’aime pas le mot « fin » ni l’idée de faire des adieux. Mais il faut aussi se préparer à cette perspective. Je ne vais pas chanter éternellement ! Si j’arrête, ce sera les tournées qui sont lassantes. J’en ai fait beaucoup et il est difficile de garder toujours un enthousiasme renouvelé alors que l’on est éloigné de sa famille. Mais je ne m’interdis pas de faire des concerts ponctuels à Paris, si l’envie est là. Je suis arrivée à un stade où j’ai l’impression d’avoir tout fait : des spectacles avec beaucoup de moyens comme des concerts plus intimistes, sauf peut-être un piano voix. Cela reste encore une possibilité vous voyez.

Cette tournée commence par le Japon.

Oui je vais me produire à Tokyo et Osaka au début du mois de février. Je vais chanter au Billboard, un club comme il y en beaucoup au Japon. J’ai souvent chanté dans des clubs là-bas.

Oui je me souviens du Sweet Basil en 1999.

Oh depuis plus longtemps et ça a toujours été plaisant. J’ai eu aussi beaucoup de plaisir à chanter au Bunkamara Hall il y a quelques années, c’est une très belle salle, noire, très élégante avec une excellente acoustique.

Quel type de spectacle présenterez-vous au Japon ?

Ce sera le tour de chant international que j’ai présenté à New-York et Montréal l’été 2011. Adapté pour le Japon bien sûr.

Puis vous reprendrez le concert symphonique cet été…

Oui. Une seule représentation salle Pleyel était frustrante. Je souhaite renouveler l’expérience pour une nouvelle série de concerts qui commencera le 1er août à Ajaccio. Cette tournée m’emmènera dans plusieurs autres villes en France et à l’étranger.

Et les Parisiens alors ?

Ah je rechanterai à Paris bien entendu. Il reste à définir le choix de la salle.

Je me suis laissé dire que votre salle préférée était le Palais des sports… que je vois de ma fenêtre…

Ah bon ? Ce serait pratique pour vous (rires). En fait, c’est vrai que je garde un excellent souvenir du spectacle que j’y ai présenté en 1981. Il était effectivement très réussi. Mais je dois dire que j’aime aussi beaucoup le Palais des Congrès, j’y ai chanté si souvent que la scène m’est devenue très familière.

Avez-vous vu le spectacle « Salut les copains » ?

Pas encore non.

La tendance est aux spectacles autour d’un artiste. Que diriez-vous d’une comédie musicale “Sylvie Vartan” ?

(Songeuse) je ne sais pas. Il faudrait organiser tout un casting pour pour recruter une chanteuse susceptible de m’incarner.

Vous n’avez pas aimé le biopic “Cloclo” ?

Ah si, la performance de Jérémie Régnier est remarquable. C’était une véritable prouesse physique aussi.

Quels étaient vos rapports avec Claude François ?

Nous nous sommes connus en tournée. Ce que montre le film est exact, il recouvrait mes affiches avec les siennes. C’était surtout un perfectionniste qui recherchait le succès à tout prix. Moi j’étais plus dans le plaisir de chanter et le succès m’est tombé dessus sans que je ne l’anticipe vraiment. Dans l’ensemble on s’est bien entendus. Il m’a d’ailleurs offert mon premier chien pour mon anniversaire, Molière, un cocker que j’aimais beaucoup et que j’ai gardé très longtemps…

Est-il exact que vous deviez chanter en duo le jour de sa disparition ?

C’est une légende, voire le fantasme de certains (rires) . Non mais j’étais effectivement sur le plateau télé quand j’ai appris la nouvelle. C’était un accident tellement absurde et inattendu.

J’étais surpris que vous repreniez “Comme d’habitude” à Pleyel.

C’était une idée de Tony. Les paroles de l’adaptation américaine -qui a fait le tour du monde dans l’interprétation de Paul Anka- n’avaient rien à voir avec le texte français qui parle de la monotonie conjugale. “My way” fait le bilan d’une vie. Et pour le final, nous voulions ce style de texte en français à dire sur la musique de Jacques Revaux. Ce dernier nous a donné l’autorisation et Eric Chemouny a donc écrit “Ma vie c’est moi qui l’ai choisie”. C’est un texte très réussi.

Je me souviens en interview vous avoir fait ce que je croyais être un compliment en vous faisant remarquer que vous n’étiez pas la créature d’un pygmalion, que vous aviez été votre propre patron. Vous auriez pu vous en enorgueillir. Or vous m’avez répondu en avoir plutôt souffert.

Oui mais j’ai toujours eu besoin d’un interlocuteur, c’est pour cela que j’ai autant aimé travaillé avec des chorégraphes, pour pouvoir échanger des idées. C’est stimulant et aussi confortable d’être deux. Maintenant c’est Tony avec qui j’élabore mes spectacles.

Lorsque vous faisiez une grosse production au Palais des sports ou des Congrès, vous étiez presqu’à la tête d’une entreprise. Cela devait représenter beaucoup de responsabilités financières, de personnel…

Oh mais je ne m’occupais que de la partie artistique : le choix des titres, leur agencement, la mise en scène. C’est ce que je préfèrais. Et je délègue toujours les aspects administratifs et comptables à ceux dont c’est le métier. J’avais une grande troupe, c’est vrai, mais c’est le chorégraphe qui s’occupait de recruter les danseurs. On travaillait en concertation disons. J’ai toujours privilégié la partie artistique. Heureusement.

Parlons de cet abécédaire « Mot à mot » dont vous faites actuellement la promotion. Vous n’aviez donc pas tout dit ?

Mon autobiographie (NDLR : « Entre l’ombre et la lumière » parue en 2004) était axée sur ma vie, laquelle a été très… dense ne serait-ce que sur le plan personnel. Il a d’ailleurs fallu un autre livre pour retracer ma carrière scénique (NDLR : « Dans la lumière » parue chez XO éd. en 2007) ! J’ai été séduite par l’idée de l’abécédaire car cela permet justement de se raconter autrement, sans suivre un récit linéaire. Chaque lettre m’a inspirée de manière spontanée, légère. Cela m’a permis de livrer des anecdotes nouvelles, de donner mon opinion parfois, de parler de mes goûts, de mes proches, de mon mode de vie, de cuisine et d’autres choses encore… Le titre est bien choisi car ce sont vraiment mes propres mots.

Vous y parlez de vos chansons de “Aimer” à “Zum zum zum”. Que pensez-vous de l’Ultimate Collection ?

J’en suis très contente. C‘est un bel objet. C’est très agréable de retrouver tous ces albums en miniature. C’est réalisé avec passion, cela se voit.

Quels sont les albums qui vous viennent en tête. J’imagine que vous en avez oubliés certains ?

Ah non, je me souviens de chacun d’entre eux. J’ai toujours choisi les pochettes avec soin. En revanche, je n’étais pas impliquée dans le choix des photos pour les disques à l’étranger ou les compilations. Je me rappelle plus particulièrement l’album enregistré à Nashville avec le cliché de Jean-Marie Périer. Et aussi le disque que j’ai enregistré en une nuit à Londres. La pochette (avec les nuages !) était l’oeuvre de Pascalini qui était le pseudonyme de Charles Matton. J’aimais aussi beaucoup les titres de cet album : « Sur un fil » d’Eddie, « L’enfant aux papillons » et « Comme un garçon » bien sûr. J’aime beaucoup « Gift wrapped from Paris ». C’est incroyable que ce disque ne soit pas sorti en France à l’époque. Je me rappelle également la pochette avec la casquette et Sniff qui déclare “Elle est toujours dans mes pattes” (rires) (“Déraisonnable” de 1979 – NDLR). Je suis contente de retrouver tous les live mais aussi les shows TV car ils me rappellent énormément de souvenirs. C’est drôle et émouvant de réécouter les bandes originales dans leur intégralité, avec les voix des participants.

J’aimerais qu’ils rééditent vos 45 T. Ceux avec les photos de Jean-Marie Périer sont indémodables.

Oh mais il y en a tellement ! J’en ai conservé des centaines. Je me souviens aussi des pochettes : celle avec le cheval notamment (« L’amour c’est comme une cigarette » paru en 1981 – NDLR), la photo avec la casquette jaune, le 45 T. avec le chapeau… J’ai tellement de chapeaux maintenant (rires). J’aimerais surtout que soit réédité mon spectacle à Sofia. L’album et idéalement le DVD si les questions de droits ne sont pas trop compliquées… J’y suis tellement attachée.

J’ai entendu dire que vous aviez le projet d’enregistrer votre prochain album à Nashville, c’est exact ?

Oui, je pense l’enregistrer en avril pour une sortie en septembre. Ce sera un album avec des titres rythmés d’inspiration country-rock disons. Je n’ai pas encore rassemblé tout le matériel. J’ai des idées de musiques et même de reprises. J’y intègrerai peut-être une ou deux anciennes chansons. Je songe à « L’heure la plus douce de ma vie » notamment…

J’aime beaucoup « J’ai pleuré sur ma guitare » que vous avez chantée en tournée au début des années 80.

C’est une excellente idée. Cela m’en fait déjà deux (rires).

L’article évoquait aussi votre retour au cinéma.

Oui je vais participer au film « Les missionnaires » de Tonie Marshall que j’aime beaucoup. J’ai appris à la connaître pendant “L’amour, la mort, les fringues” justement et je me réjouis de travailler de nouveau avec elle. Ce sera un petit rôle mais y participer me fait vraiment plaisir car j’ai lu le script qui est très drôle. Il y est question de Meetic, le site de rencontres. Cela changera de l’univers de « L’ange noir » ou de « Mausolée pour un garce ». Le tournage est reporté à cet été pour des raisons de casting. Je n’ai pas trop de jours de tournage donc cela devrait pouvoir se concilier avec ma tournée. J’ai un projet qui me tient particulièrement à coeur. Il s’agit d’un court-métrage réalisé par Stéphanie Murat, dans un registre beaucoup plus grave. L’inconvénient du cinéma, c’est que beaucoup de paramètres entrent en ligne de compte car il y a beaucoup plus de personnes impliquées que dans la chanson où l’on peut décider seul du moment où l’on enregistre, où l’on part en tournée.

Et vous êtes libre de vos choix artistiques. C’est d’ailleurs sur scène que vous exprimez le mieux votre créativité.

Et c’est pour cela que je n’ai pas pu travailler avec Alfredo Arias. On peut se prêter à une mise en scène pour les besoins d’un rôle au théâtre ou au cinéma mais lorsqu’on est chanteur et qu’on porte seul la responsabilité du spectacle, on doit rester authentique.

Vous parliez de Meetic, sujet de votre prochain film. Quels sont vos rapports avec Internet ?

C’est surtout ma fille qui est intoxiquée. Elle a aussi beaucoup de mal à se défaire de son i-phone, c’est une véritable addiction. Votre fille aussi ? C’est bien le problème de cette génération (rires). J’étais une adolescente beaucoup moins rebelle. Il faut dire que mon enfance a été particulière et que mon adolescence a été bousculée par mes débuts dans la chanson.

Vous mettez de la musique sur votre i-phone ?

Non. Je n’écoute pas de musique, personne ne me croit quand je le dis. C’est fou quand j’y pense. J’écoute les news à la radio. En France, j’écoute Europe 1.

La radio de “Salut les copains” !

Exactement, je suis fidèle (sourire)…

Comme le sont vos fans. Quel message aimeriez-vous leur adresser ?

Je les remercie de leur fidélité. Je voudrais leur dire combien je tiens à cette complicité et à cette amitié qui nous lient depuis si longtemps.

Merci Sylvie

Merci Laurent pour tout ce que vous faites, Jean-Jacques et vous et à très bientôt !

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